Derrière l’écran…
Bien calé derrière notre ordinateur, nous avons une capacité de nous abstraire de la réalité concrète, nous nous sentons tout puissant car connectés au monde sans pour autant avoir en rien la nécessité d’y intervenir.
Autrefois, c’est la création, la page blanche ou la toile vierge, qui donnait cette impression de liberté et de puissance…
Qu’avons-nous fait de notre créativité ?
Dans un monde fait de contraintes constantes, Internet donne l’impression d’être un champ libre. Nous pouvons circuler comme bon nous semble, avoir des contacts et les écraser. Ne plus répondre et dénier à chacun son existence. Nous pouvons briller, prétendre être ce que nous ne sommes pas. Utiliser l’image ou les mots pour sculpter un visage que nous rêverions d’avoir. Nous pouvons « quantifier » les gens en additionnant les amis, avoir une popularité supposée calculée en « like » savamment distribués… Faire le buzz ou créer la surprise pour être certains d’avoir une existence. Mais nous ne faisons rien de plus que projeter une image inventée sur un écran toujours changeant et dont nous n’avons même pas la certitude qu’il sera regardé.
Et pourtant, malgré tout, Internet est une puissance libératrice : un catalyseur de toutes nos peurs. On ose se lancer, demander un rendez-vous, envoyer un CV, un mail vengeur, défendre son point de vue, justement parce que l’espace de sécurité est maintenu.
Nous pouvons prendre la comparaison avec la méditation : étant dans un espace où nous nous sentons en sécurité, nous avons le courage de faire face à ce qui nous mine, nous fait peur ou nous trouble. Nous voulons bien regarder au fond de nous-même parce que nous le faisons depuis une réalité protectrice.
De même Internet renforce notre centrage, notre capacité à nous surprotéger et de fait, nous permet plus d’audace, une forme de création qui n’est peut-être plus celle d’une œuvre extérieure à nous, mais une affirmation différente de soi : un peu comme si finalement, nous avions l’autorisation d’ouvrir de nouvelles voies dans notre personnalité.